Face à l’augmentation de l’artificialisation des sols, à la dégradation des espaces et habitats naturels, à l’augmentation de la pollution atmosphérique et des émissions de gaz à effet de serre ayant pour conséquence le dérèglement climatique et ses répercussions néfastes, la restauration des écosystèmes est un enjeu fort. Restaurer la nature en ville est un des moyens permettant de réduire les effets du changement climatique, notamment en luttant contre les îlots de chaleur. Reconstruire des écosystèmes là où la logique de l’urbanisation a repoussé la nature loin des villes devient un défi, qu’il est possible de relever en végétalisant les espaces disponibles en ville, quitte à désartificialiser et à imaginer des espaces où le végétal trouverait toute sa place. Végétaliser, oui, mais pas n’importe comment ni avec n’importe quoi ! De nombreuses palettes d’espèces horticoles pour les aménagements paysagers existent, mais il s’agit souvent de variétés sélectionnées (cultivars) à partir d’espèces indigènes ou exotiques. Les Espèces Exotiques Envahissantes ou les espèces exotiques dont on soupçonne le potentiel invasif, sont à proscrire et à prendre en compte localement. En contexte très urbain, éloigné des milieux naturels, les espèces horticoles peuvent convenir aux objectifs de végétalisation : elles sont parfois plus résistantes à ces conditions (pollutions, excès d’azote, etc.). Cependant, en contexte péri-urbain, en milieu rural ou en contexte urbain mais connecté à des milieux naturels, nous conseillons d’utiliser au maximum des espèces sauvages et locales dans les projets d’aménagement qui contribueront alors à restaurer des communautés végétales et animales en améliorant la connectivité des populations locales déjà présentes et en favorisant l’accueil de nouvelles populations.
Cette palette est composée d’espèces présentant à la fois un intérêt ornemental (floraison, port, feuillage…), un intérêt à former un massif en raison de leur capacité à couvrir l’espace, un intérêt pour la biodiversité en accueillant l’entomofaune, ou encore pouvant faire l’objet d’usages ethnobotaniques (plantes médicinales, comestibles…). Ces espèces peuvent être proposées pour fleurir des espaces pédagogiques, pour végétaliser des cours d’écoles ou des jardins municipaux par exemple. Selon les choix opérés, elles peuvent contribuer à améliorer la qualité des sols et des eaux, contribuer à la désimperméabilisation des sols, améliorer l’accueil de la biodiversité, créer des îlots de fraîcheurs, embellir le cadre de vie, améliorer l’intégration paysagère… Ces espèces se prêtent ainsi à un projet d’aménagement paysager particulier ou public, en contexte urbain ou péri-urbain, et peuvent potentiellement être produites en pépinière.
Une forte vigilance est à apporter sur le choix des espèces en fonction des conditions écologiques du site à aménager : choisir des espèces adaptées contribue à maximiser ainsi les chances de reprise. Il convient de bien étudier au préalable les conditions du site à aménager (exposition, altitude ; texture, humidité, acidité et richesse en matière organique du sol). Les espèces de la gamme principale sont relativement faciles à implanter. Pour les jardiniers professionnels et entreprises du paysage, nous avons proposé des espèces supplémentaires, plus délicates à produire ou à entretenir, elles sont classées « compléments pour jardiniers avertis » dans la colonne G.
La plupart de ces espèces peuvent être produites et implantées en godet (plusieurs formats de pots existent) il est conseillé d’anticiper le chantier en contactant préalablement quelques producteurs pour connaître leurs stocks et leur temporalité (voir guide OFB De la graine au paysage) . Certaines peuvent également être semées (dans ce cas se référer aux conseils techniques de la PALETTE 5). Les plantations peuvent avoir lieu à l’automne ou au début du printemps, sur sol non gelé, sachant que dans les régions exposées aux sècheresses, il est conseillé de privilégier les plantations d’automne.
Toutes les espèces proposées ici ne peuvent s’adapter à toutes les situations. À partir de l’étude de votre site à aménager, l’utilisation des filtres proposés dans les tableaux téléchargeables vous permet d’adapter votre sélection de plantes aux conditions locales, aux qualités du sol et à l’écologie du milieu receveur. Ainsi, vous retrouverez dans les colonnes U à Z la possibilité de filtrer les espèces en fonction de l’exposition à la lumière, de l’altitude, de la texture, de l’humidité, de l’acidité et de la richesse en matière organique du sol.
La préparation du sol est une étape fondamentale pour la reprise des végétaux notamment pour limiter l’envahissement par des espèces adventices les premières années. De manière générale, la terre doit être relativement pauvre en matière organique (contrairement aux massifs « classiques » et aux terres maraîchères) et en semences d’espèces rudérales adventives. En effet, les espèces de cette gamme poussent naturellement sur des sols beaucoup moins riches que les sols déjà cultivés, anciens massifs paysagers, friches, etc. Il existe plusieurs techniques pour appauvrir son sol : on peut retirer la première couche de terre (les premiers centimètres) pour atteindre l’horizon B (couche du sol pauvre en humus mais souvent riche en minéraux), et/ou apporter des éléments minéraux (rebut ou stérile de carrière, gravier concassé, sable…mais aucun remblai d'origine inconnue). On peut également réaliser plusieurs faux-semis ou plusieurs désherbages manuels pour appauvrir la terre et réduire les espèces adventives. Une autre astuce consiste à apporter un compost de déchets vert très riche en carbone, qui limitera les annuelles les premières années le temps que les vivaces s’installent (attention toutefois aux carences en azote). À l’inverse, certaines espèces nécessitent un enrichissement du sol en notamment s’il est déjà très pauvre et minéral. Quoiqu’il en soit, avant toute opération, il convient de bien analyser son terrain. Pour connaître la bonne démarche à adopter, vous trouverez quelques conseils et quelques exemples de massifs à télécharger ici, réalisés par deux pépinières labellisées Végétal local sur le Massif central.
Un paillage peut être réalisé pour limiter le désherbage des espèces herbacées vivaces, notamment si le sol a été appauvri (ou naturellement pauvre en matières organiques), à condition qu’il ne soit pas trop épais (inférieur à 15 cm). Ce paillage peut être composé de bois raméal fragmenté (BRF), copeaux de bois, broyats de déchets verts, paille ou foin, cosses de sarrasin... Apporter un paillage de 15 cm maximum de matière carbonée permet d’éviter les germinations des adventices annuelles en surface, grâce à l’occultation et la baisse du niveau de richesse du sol en azote.
Les arbres et arbustes peuvent, quant à eux, être paillés généreusement et plantés sur des sols plus riches en matière organique.
Une autre astuce pour limiter l’entretien les premières années ou augmenter la diversité floristique, consiste à semer des espèces annuelles (de la palette 5) entre les espèces vivaces. Dans ce cas, le paillage n’est pas conseillé car il limitera la capacité des annuelles semées à germer.
Planter des espèces locales sauvages ne signifie pas abandonner tout entretien ! Comme tout autre espace végétalisé dans un aménagement paysager, la gestion du site sur le moyen terme devra être réfléchie : il faudra penser à désherber, limiter les espèces qui prennent le dessus et favoriser les espèces plus longues à s’installer. La plupart du temps, il s’agit de désherber les espèces rudérales adventives les plus dynamiques qui affectionnent les espaces enrichis tels que les potagers. Quelques connaissances botaniques sont alors nécessaires pour distinguer ces espèces et un temps de formation à destination des agents chargés de l’entretien peut être envisagé. Le nombre de passages dépendra beaucoup de la qualité du sol : un sol très riche aura tendance à favoriser rapidement des espèces conquérantes et « non désirées ». Dans tous les cas, la nature ayant horreur du vide, l’espace aura tendance à se végétaliser naturellement. En outre, accueillir la biodiversité consiste aussi à composer avec ces espèces qui arrivent spontanément. Un désherbage sélectif pour maintenir les espèces sauvages plantées et les espèces spontanées non envahissantes pourra être imaginé. Concernant la taille des végétaux : elle peut être réalisée ou non, en fonction des objectifs initiaux concernant l’esthétique ou un aspect « pratique » (problème de vis-à-vis, etc.). Cependant, en termes d’accueil de biodiversité et de respect du vivant, moins on taille, mieux la nature se porte !