Des habitats et des espèces parmi les plus menacés en Europe

La conservation des forêts alluviales représente un enjeu fort de préservation de la biodiversité et plus largement de l’environnement sur la vallée du Rhône ! Pourquoi ? Parce qu’elles remplissent des fonctions écologiques et économiques essentielles et que ces dernières sont l’objet de multiples atteintes depuis de nombreuses décennies… Or détruire les forêts alluviales coûte particulièrement cher à la société...

Des services inestimables ?

Protection contre l’érosion des berges et les inondations : un rôle clé

Grâce à leurs systèmes racinaires denses et profonds, les arbres et arbustes des forêts alluviales tels que les saules, les aulnes, les frênes ou le peuplier noir, stabilisent les berges et les protègent contre l’érosion... Les rideaux boisés minimisent l’intensité des perturbations hydrologiques des crues par le stockage provisoire de l’eau, le ralentissement du ruissellement et le lessivage des sols. Un hectare de forêt alluviale, c’est plusieurs dizaines de milliers de m3 d’eau qui ne toucheront pas les zones urbanisées, gratuitement...

Amélioration de la qualité de l’eau : un atout majeur

L'ombre des arbres contribue à maintenir une température de l'eau fraîche, limitant ainsi la prolifération des algues filamenteuses. Les forêts alluviales agissent comme des filtres naturels, retenant et dégradant les pollutions d'origine agricole ou urbaine (nitrates, phosphates, phytosanitaires…) grâce à la forte biomasse végétale et aux micro-organismes du sol : un système d’épuration gratuit, fonctionnel et durable !

Un espace de loisirs prisé par les habitants

Les forêts alluviales offrent des lieux de détente et de loisirs très appréciés en raison de leur fraîcheur, de la facilité de déplacement (voies vertes, chemins de halage) et de leur qualité paysagère. Elles sont propices à la promenade, la course à pied, le cyclisme, la pêche, la chasse, la découverte de la flore et de la faune, etc.

Des réserves de biodiversité

Nombre de forêts alluviales sont des habitats naturels remarquables. Lorsqu’elles sont matures et soumises aux aléas du fleuve, elles présentent de nombreux microhabitats appréciés de multiples groupes (champignons, lichens, bryophytes, invertébrés, amphibiens, chauves-souris, oiseaux...). Elles constituent un corridor écologique de premier ordre. Voir aussi notre page consacrée à la biodiversité.

Qu’on se le dise : les services rendus par les forêts alluviales représentent des économies considérables ! Leur capacité à stocker l'eau en période de crues permet d'éviter la construction de coûteux ouvrages de rétention tandis que leur rôle dans l'épuration de l'eau réduit les coûts de traitement. Il est temps de reconnaître leur véritable valeur et de mettre en œuvre des actions pour les protéger durablement.

Forêts menacées

Des forêts parmi les plus menacées d’Europe ?!

Les ripisylves et plus largement les forêts alluviales constituent l’un des deux types de forêts les plus menacés à l’échelle européenne d’après la récente liste rouge européenne des habitats...

La vallée du Rhône, un territoire fortement urbanisé !

Les forêts alluviales, a fortiori lorsqu’elles sont situées dans un contexte urbain, souffrent de l’extension des zones d’activités, commerciales, industrielles et urbaines... Chaque année, plus de 250 ha de terres agricoles et forestières sont artificialisés sur le département du Rhône.

Zones urbanisées

Une dynamique fluviale perturbée

De tous les fleuves français, le Rhône est celui qui a connu le plus grand nombre d’aménagements (épis, casiers, canaux, barrages, ballastières). Ces ouvrages ont entraîné une perte de dynamique alluviale et provoqué la régression voire la disparition des communautés végétales pionnières inféodées aux dépôts sédimentaires fins.

Ouvrages hydrauliques

Une flore en pleine mutation

De nombreuses espèces exotiques envahissantes (renouées asiatiques, Balsamine de l’Himalaya, Robinier faux-acacia...) sont favorisées par les remaniements du substrat et le transport par flottaison. Cet appauvrissement de la flore indigène agit sur d’autres groupes d’espèces. La préservation de forêts alluviales en bon état de conservation constitue un moyen efficace pour freiner leur propagation.

La plantation de brise-vents en Peuplier d’Italie et l’abandon de rémanents viticoles contribuent aussi à la pollution génétique du Peuplier noir et à la prolifération de vignes exotiques envahissantes.

Espèces exotiques envahissantes

Des agents pathogènes destructeurs…

La Graphiose de l’Orme (Ophiostoma ulmi) ou la Chalarose du frêne (Chalara fraxinea) illustrent les impacts d’agents pathogènes introduits. Le Frêne de Mandchourie a probablement véhiculé la Chalarose. Les porte-greffes américains de vigne peuvent être porteurs sains de la flavescence dorée atteignant aussi la Vigne sauvage.

Chalarose

Une sylviculture non adaptée aux enjeux écologiques

Défrichements, coupes, entretiens excessifs et extension de la culture de peuplier modifient les interactions biologiques et compromettent la résistance et la résilience des forêts alluviales. Les besoins des centrales à biomasse conduisent parfois à des coupes à blanc et à une homogénéisation des peuplements au détriment de la biodiversité.

Des pratiques alternatives existent : favoriser les mélanges d’essences en régénération spontanée et les traitements irréguliers (futaie jardinée, bouquets).

Peupleraie artificielle

Une agriculture actuelle gourmande en eau et en espaces

Près de la moitié de la vallée du Rhône est occupée par l’agriculture. Dans le lit majeur, les défrichements, l’intensification des pratiques et l’usage d’intrants participent à la fragmentation des forêts alluviales et à la libération de polluants. Le drainage des zones humides et les pompages accentuent l’assèchement et la déconnexion des forêts alluviales.

Irrigation du maïs

Une pollution diffuse pas toujours maîtrisée

Les forêts alluviales, difficiles d’accès, sont parfois utilisées comme zones de décharge sauvage. Les crues captent et piègent de nombreux déchets (embâcles), enfouis progressivement sans être dégradés. À cela s’ajoutent des pollutions chimiques (métaux, PCB, PFAS...) dont les impacts sanitaires sont préoccupants.

Macro-déchets

Des impacts du réchauffement climatique indirects mais réels

Le changement climatique modifie les régimes de précipitations, de température et la fréquence des événements extrêmes. Baisse des débits d’étiage, augmentation des crues violentes, prolifération d’algues et concentration de polluants : autant de pressions susceptibles d’affecter les forêts alluviales.

Crues et sécheresses

Il est important de noter que ces différentes atteintes sont souvent interconnectées et peuvent avoir des effets cumulatifs sur les forêts alluviales. La préservation de ces écosystèmes fragiles nécessite une approche globale et intégrée... C’est à travers ce défi que le CBN Massif central entend animer son plan national d’action en faveur des forêts alluviales.